Pas de tsunami en vue pour l'instant
par Jean-François Clavel
Entre scénario catastrophe et banalisation totale, la rumeur publique va bon train et il est bien difficile de se faire
Le Kick'em Jenny, entre les Grenadines et Grenade
une idée de l'état actuel du risque que
représente le volcan sous-marin Kick'em Jenny, situé 4 milles nautiques au nord de l'île de Grenade.
Un volcan sous surveillance
Alerte orange
Ce volcan, surveillé continuellement par le 'Seismic Research Centre' de l'université des Antilles (University of the West Indies) en collaboration avec la NOAA
(National Oceanic and Atmospheric Administration), l'agence fédérale américaine d'observation des océans et de l'atmosphère, a été récemment passé (23 juillet
2015) en niveau d'alerte orange du fait de l'élévation notoire de son activité sismique et l'augmentation des dégazages constatés sur place et à proximité.
Éruption possible sans plus de signes
Les spécialistes en charge de la surveillance estiment que dans de telles conditions une éruption pourrait subvenir sans plus de signe avant coureurs sous moins de
24 heures.
En effet, des signaux sismique de type volcano-tectoniques, caractéristiques d'une reprise de l'activité volcanique, ainsi que des signaux de longue période,
annonçant l'imminence d'une éruption, ont été relevés depuis le 11 juillet dernier, et tout particulièrement dans la nuit du 22 au 23 juillet.
Des mesures claires pour la population
En mer
Dans ces conditions, une zone d'interdiction totale à la navigation, entourant le cratère du volcan, est fixée à 1,5 kilomètre de rayon (0,8 milles nautiques).
Une seconde zone, interdite aux navires de croisière, est fixée à 5 kilomètres (2,7 milles nautiques). Le premier risque dans ce type de situation concerne les
Le mouillage de Ronde aujourd'hui zone interdite
navires croisant à proximité, les dégazages du volcan pouvant faire chuter brusquement la densité de l'eau (mélange eau-gaz), ce qui les privent d'une partie de
leur flottabilité, pouvant aller jusqu'à les faire couler purement et simplement.
A terre
A terre, les populations situées en zones à risques sont informées des procédures d'une éventuelle évacuation et les moyens de transports permettant cette
évacuation prêt à être utilisés. Les radios locales des îles de Grenade, Saint Vincent, La Barbade et Trinidad sont placées en alerte afin de tenir informée la
population à qui une écoute permanente est conseillée.
Des risques réels dans la zone
Des risques évidents de naufrages
Le risque de naufrage au niveau du volcan lui même est évidant. C'est d'ailleurs probablement ce qui s'est produit en août 1944 pour l'Island Queen, qui, après
avoir quitté Grenade par mer belle et temps maniable, n'a jamais atteint Saint Vincent, ni laissé d'épave ou de survivant. Sa route passait par le Kick'em
Jenny.
Un risque de tsunami faible
A contrario, les risques d'un tsunami majeur sont jugés faibles par les experts.
Modélisation 3D du cratère
Profondeur du cratère
La profondeur du cratère (-200 mètres) limite le potentiel explosif du volcan et de se fait sa capacité à générer un tsunami par ce biais. Il faudrait que le
cratère se rapproche plus de la surface (ce qui arrivera sans aucun doute un jours, peut être pas si lointain) pour pouvoir former un tsunami majeur du fait d'une
éruption. On notera entre autre que l'altitude est passée de -232 à -190 mètres entre 1962 et 1966, et que le sommet à même culminé à -150 mètres à la fin des
années 80, avant de s'effondrer.
Faible impacte
D'autre part, les récentes modélisations numériques n'ont pas apportées de preuves évidentes qu'un tsunami mettant en danger la vie des populations puisse non plus
se former du fait d'un effondrement du cratère, rapport à son faible volume.
Par le passé
Cependant, si ce risque est faible, il n'est pas nul. Preuve en est la dernière éruption majeure du Kick'em Jenny en juillet 1939, qui en plus d'une large colonne
de fumé et de projections de roches à plus de 200 mètres au dessus de la surface, a généré un petit tsunami d'une amplitude de deux mètres sur les côtes de Ronde
Island et du nord de l'île de Grenade.
Rester vigilant
Bien sur, depuis lors, une douzaine d'éruptions mineures, sans manifestations extérieurs visibles, ont été mesurées, ce qui ne veut en aucun cas dire qu'il en
sera de même pour la prochaine. Mieux vaut se méfier de l'eau qui dort tout autant que du volcan qui sommeille.